Mahomet et les quatre premiers califes

Mahomet et les quatre premiers califes

Père Moussali : lettre sur un dialogue islamo-chrétien et ses incompréhensions


Nous publions cette lettre, de mai 2001, pour son actualité, hélas toujours aussi douloureuse, quant à l'aveuglement de certains catholiques; lettre d'un homme rejeté par beaucoup de ses pairs, en son temps, à cause de sa grande lucidité sur l'Islam et de sa non moins grande connaissance du Coran.
Cher ami, merci de m'avoir envoyé le texte [d'un collaborateur du SRI].
J'y trouve tout d'abord une façon assez cavalière d'aborder des problèmes qui demandent, dans leur maniement, une infinie délicatesse! Que voilà des assertions qui sont sans nuance. Quoi qu’il en soit, ce texte est une suite d’affirmations gratuites et décousues !
Ainsi, on trouve affirmé que « le Concile Vatican II a reconnu que Dieu a parlé dans d’autres révélations ». Nulle part, le Concile ne parle de révélation en dehors de Jésus-Christ. Le Concile, par contre, parle de la connaissance de Dieu qui est « possible, même pour les non-chrétiens » (L.G. 16 ; GS 12,36) ; Église et religions non-chrétiennes 2, où il est dit : « l’Église ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère leurs manières d’agir et de vivre, les règles et les doctrines qui… apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes. Toutefois, elle annonce, et elle est tenue d’annoncer sans cesse, le Christ qui est « la voie, la vérité et la vie » dans lequel les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse et dans lequel Dieu s’est réconcilié toutes choses. »
Quand il s’agit de la Révélation, le Concile est très clair. A plusieurs endroits est affirmée la plénitude de la Révélation en Jésus-Christ. Les références sont nombreuses : « Le Christ, plénitude de la révélation, achève la Révélation en la complétant par la manifestation de lui-même… (La Révélation Divine 4) Le Christ achève toute la Révélation (§ 7). La profonde vérité de la Révélation resplendit pour nous dans le Christ médiateur et plénitude de toute la Révélation (Révélation Divine 2, 7) Le Concile ajoute : «  Aucune Révélation publique n’est plus à attendre avant la manifestation glorieuse du Christ (Lumière des Nations 25 ; Révélation Divine 4).
[Ce prêtre] affirme aussi : «  Nier qu’il y a une révélation autre que celle que le Christ nous a apportée est en contradiction flagrante avec son message ! » Affirmation gratuite contredite par tout le Nouveau Testament qui dit haut et fort que « Celui qui ne reçoit pas le message du Fils, le Père ne le reconnaîtra pas. » Il n’y a qu’à lire saint Jean. Aussi bien dans son évangile que dans ses épîtres, on trouve affirmé que celui qui ne reconnaît pas que Jésus est le Fils de Dieu, n’est pas de Dieu. Si j’ai un conseil à donner à ce prêtre ce serait de lire et méditer ce que La Commission Théologique Internationale de l’Église a publié dans son document « Le christianisme et les religions », le 30 septembre 1996. Le texte dit, entre autres choses : « Pour bien poser le problème des autres religions en christianisme, il faut réaffirmer deux convictions théologiques fondamentales : l’initiative de Dieu le Père qui veut le salut de tous les hommes et l’unique médiation de Jésus-Christ… Ni une limitation de la volonté salvifique de Dieu, ni le fait d’admettre des médiations parallèles à celle de Jésus, ni l’attribution de cette médiation universelle au Logos éternel qui ne serait pas identique à Jésus, ne sont compatibles avec le message néotestamentaire. »
Le document rappelle plusieurs pistes traditionnelles pour exprimer la signification universelle du Christ : les « semences du Verbe », « le Fils de Dieu s’est uni à tout homme », la dimension christologique de l’image. Quant à l’Esprit, il est périlleux de trop l’émanciper du Christ : « on ne peut pas penser une action de l’Esprit-Saint qui ne soit pas en rapport avec l’action universelle de Jésus. »
Il convient de penser l’action de l’Église, non pas comme lieu exclusif du salut mais « comme sacrement universel de salut ». Ce qui veut dire que l’Église est l’instrument privilégié de la venue d’un salut dont elle n’est pas l’origine. « Dans la mesure où l’Église reconnaît, discerne et fait siens le vrai et le bien que l’Esprit-Saint a accompli dans les paroles et les actes des non-chrétiens, elle devient toujours davantage l’Église catholique véritable. »
Le texte ajoute : «  Les religions ne peuvent être porteuses de la vérité salvatrice que dans la mesure où elles conduisent les hommes à l’amour véritable. » C’est bien en Jésus que se trouve la plénitude de la Révélation et seuls les écrits bibliques peuvent être qualifiés d’inspirés. Seule la foi chrétienne vit de Dieu Un et Trine. Il peut y avoir cependant dans les religions des éléments d’une véritable connaissance de Dieu.
La Commission termine : «  La vérité de Jésus-Christ est toujours service de l’homme ; c’est la vérité de celui qui donne sa vie pour les hommes, pour les faire entrer définitivement dans l’amour du Père. » Le dialogue interreligieux portera sur les deux questions centrales du sens de Dieu et du sens de l’homme. Il réclame « l’humilité du Christ et la transparence de l’Esprit-Saint ».
On voit bien que le texte de la Commission est autrement plus nuancé que les affirmations de ce prêtre faites à l’emporte-pièce. (On trouve le condensé du texte de la Commission dans la Croix du jeudi 13 mars 1997).
Ce prêtre affirme aussi : « Lorsqu’un musulman me dit que je n’ai pas totalement la foi, ce n’est pas pour dire que la sienne est meilleure ! » Eh bien, si, justement. Notre ami, [prêtre de Jésus-Christ?], montre qu’il est parfaitement étranger à la psychologie du musulman pour qui tout ce qui n’est pas musulman tient de « l’impiété ». Le Coran ne traite-t-il pas les chrétiens de « stupides » ? (Coran 9, 30-33)
Ce prêtre affirme : « Il n’y a pas d’êtres laids ». De quel droit juger de haut les autres hommes, quels qu’ils soient ? Le problème ne concerne pas les hommes, mais l’idéologie qu’ils portent en eux-mêmes et qui les porte.
Il affirme : « La vérité de l’autre peut faire mal, mais elle est profondément salvatrice ». On est en pleine confusion ! De quelle vérité parle-t-on ? Est-ce que le fait de dire que Jésus n’est pas Fils de Dieu est salvateur ? Est-ce de dire que Dieu ne s’est pas incarné et que Jésus-Christ n’est pas mort sur la croix et qu’il ne nous a pas rachetés est quelque chose de salvateur ? Allons donc !
Ce prêtre affirme : « La sharia est parole d’homme et non de Dieu ». Il s’agit là d’une affirmation tout à fait gratuite. Pour un musulman, la sharia est de Dieu. Elle se confond même avec le culte à rendre à Dieu. Ne prêtons pas aux autres ce que nous voudrions qu’ils disent ! Acceptons-les tels qu’ils se présentent à nous et non pas tels que nous voudrions qu’ils soient !
Il affirme enfin : « Tu es venu nous dire que Dieu est Un et Trois… Dieu est infini ! » Devant cette affirmation, notre ami se confond en admiration ! J’avoue qu’il y a dans cette attitude une profonde inconscience. Il ne faut pas confondre Trinité avec Trithéisme !
Voilà les réflexions que m’a suggérées ce mauvais texte qui part d’une générosité sincère mais déforme la vérité de la foi en Jésus-Christ.

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